Escrime inclusive

L’escrime inclusive

Par Celya

J’ai toujours été intéressée par les activités et métiers que les personnes aveugles ou malvoyantes sont capables de faire, c’est pour cela que j’ai voulu vous parler de l’escrime inclusive.

Ce sport est connu en Suisse, mais très peu accessible aux déficients visuels. J’ai essayé de contacter plusieurs personnes dans le monde de l’escrime en Suisse, dont des maîtres d’armes ou des membres de club, mais personne ne connaissait la possibilité pour une personne déficiente visuelle de pratiquer ce sport.

À travers cet article, j’espère que vous pourrez en apprendre davantage sur cette activité et les adaptations mises en place pour les aveugles et malvoyants.

L’escrime traditionnelle, c’est quoi ?

L’escrime, aujourd’hui synonyme d’élégance sportive, puise ses racines dans l’Antiquité. Utilisée d’abord comme technique de combat, elle a évolué pour devenir un art martial sophistiqué, avant de se transformer en discipline sportive moderne. Dès l’époque égyptienne, les premiers témoignages d’affrontements à l’épée apparaissent sous forme de fresques. Cependant, ce sont les Grecs et surtout les Romains qui raffinent les techniques, influençant durablement l’escrime militaire.

Au Moyen Âge, la chevalerie adopte l’épée comme symbole de noblesse et de prestige. Les combats se codifient peu à peu, notamment avec l’apparition des traités d’escrime au XVe siècle. En Italie et en Espagne, les maîtres d’armes se multiplient, perfectionnant l’art du duel, alors strictement réservé aux classes sociales élevées. L’escrime devient progressivement un moyen de défense personnelle, tout en conservant ses liens avec l’honneur et la justice.

Au XVIIe siècle, la France prend le relais en révolutionnant l’escrime avec l’introduction du fleuret, arme légère permettant des duels moins mortels. Le roi Louis XIV contribue à populariser la discipline, tandis que des académies d’escrime se forment et que les techniques se standardisent.

La transition vers une pratique sportive est officialisée au XIXe siècle avec l’établissement de règles claires, comme l’abolition des duels, désormais illégaux. L’escrime s’intègre aux Jeux olympiques modernes dès 1896, devenant l’une des rares disciplines présentes depuis la première édition. Trois armes — le fleuret, l’épée et le sabre — sont adoptées pour les compétitions officielles, chacune avec ses spécificités techniques et historiques.

Aujourd’hui, l’escrime demeure un sport exigeant, combinant agilité, précision et stratégie, tout en perpétuant un héritage aristocratique et militaire. À travers ses multiples évolutions, l’escrime a su conserver son esprit d’élégance et de maîtrise, devenant une discipline universelle qui fascine toujours autant.

Les juges en escrime parlent français en raison de l’importance historique de la France dans le développement de ce sport

Les armes et les règles

L’escrime moderne se pratique avec trois armes principales : l’épée, le sabre et le fleuret. Chacune d’elles possède des règles spécifiques, un style distinct, et des zones de touche différentes. Voici les principales différences entre ces trois armes :

L’Épée

  • L’épée est l’arme la plus lourde des trois, pesant environ 770 grammes. Sa lame est rigide et droite.
  • Cible valable : La totalité du corps est une cible, des pieds à la tête, y compris les membres.
  • Type de touche : seules les touches portées avec la pointe de l’arme sont valables (touche d’estoc).
  • Règle de priorité : Il n’y a pas de convention de priorité à l’épée. Le premier à toucher marque le point.
    Cependant, s’il y a double touche (les deux tireurs touchent en même temps), un point est attribué à chaque adversaire.

Le Sabre

  • Le sabre est une arme plus légère que l’épée, pesant environ 500 grammes. Sa lame est légèrement courbée et souple.
  • Cible valable : seule la partie supérieure du corps, de la taille à la tête, est une cible valable. Y compris les bras.
  • Type de touche : Contrairement à l’épée, on peut toucher avec le tranchant, le dos de la lame ou la pointe (touche de taille, de contre-taille et d’estoc).
  • Règle de priorité : Le sabre suit des conventions strictes de priorité, comme le fleuret. Seul le tireur ayant « l’attaque » initiale a la priorité, et l’autre doit défendre ou parer avant de pouvoir attaquer.

Le Fleuret

  • Le fleuret est l’arme la plus légère, pesant environ 500 grammes, avec une lame fine, souple et droite.
  • Cible valable : seul le torse, y compris le dos et les épaules, est une cible valable. Les bras, la tête et les jambes ne comptent pas.
  • Type de touche : Comme pour l’épée, seules les touches avec la pointe (touche d’estoc) sont prises en compte.
  • Règle de priorité : Le fleuret obéit à des conventions strictes de priorité, similaires au sabre. Pour marquer un point, le tireur doit avoir la priorité (attaquer en premier). Il peut aussi reprendre l’initiative après une parade ou une esquive.

L’escrime pour non-voyant, une discipline relativement récente

On pratique l’escrime depuis des siècles. L’idée de rendre ce sport accessible aux non-voyants s’est développée principalement au cours du XXe et du XXIe siècle.

L’idée de l’escrime pour aveugle a émergé dans un contexte où de nombreuses disciplines sportives, comme le judo, la natation ou encore l’athlétisme, étaient adaptées aux personnes aveugles ou malvoyantes. L’escrime étant un sport basé sur la précision, la perception spatiale et la rapidité de réaction, les premiers essais ont cherché à trouver des moyens de compenser l’absence de vision par des ajustements des règles et des pratiques.

Adaptations et règles

Les premières compétitions d’escrime pour non-voyants ont vu le jour grâce à des clubs qui ont expérimenté des adaptations spécifiques du sport. En France et en Italie, en particulier, l’escrime a une longue tradition. Des pionniers dans le domaine, souvent en collaboration avec des associations pour personnes malvoyantes, ont commencé à organiser des démonstrations et des compétitions locales. Ceci pour évaluer la faisabilité de la pratique.

Ces ajustements ont été mis en place pour donner aux participants déficients visuels une chance égale de réagir et de s’adapter aux mouvements adverses. Cela leur permettait de se concentrer sur les sensations tactiles et auditives plutôt que visuelles.

Ce sport se pratique debout sur des pistes, les consignes et les règles sont identiques à celles de l’escrime traditionnelle. Il est important d’avoir des lignes en relief sur le sol. Cela permet à celui ou celle qui va tirer de précisément sentir sa position.

Avant d’engager une attaque, l’escrimeur aveugle doit d’abord établir un contact avec son adversaire. Celui-ci peut se faire soit avec la lame (la partie tranchante de l’arme) de l’adversaire, ou avec la coquille (la garde qui protège la main de l’escrimeur). Cela lui permet de savoir exactement où se situe son adversaire.

Ce contact est crucial pour des raisons de sécurité et d’équité. Il permet à l’escrimeur non-voyant de s’assurer qu’il attaque dans la bonne direction et d’éviter des mouvements qui pourraient entraîner des dégâts collatéraux.

En ayant ce contact, l’escrimeur respecte également les consignes d’engagement propres à l’escrime pour aveugles, où l’orientation spatiale et la précision sont essentielles.

Cette règle assure que les deux adversaires sont totalement conscients de la position de l’autre avant toute action offensive, qui garantit ainsi un combat plus sûr et plus équitable.

Évolution et reconnaissance

Avec le temps, l’escrime pour déficients visuels a gagné en popularité, notamment en Europe. La France, l’Italie et l’Angleterre ont organisé des évènements, souvent en marge des compétitions d’escrime classique. Ces initiatives ont favorisé la reconnaissance de cette discipline et l’implication croissante des fédérations nationales d’escrime. L’escrime pour non-voyants a également été promue dans des compétitions de sport adapté, bien qu’elle ne fasse pas encore partie des disciplines paralympiques.

Mon avis

Quand, j’ai su qu’il existait des clubs d’escrime pour aveugles, j’étais super fière et heureuse. Pour moi, c’est important que les voyants et non-voyants se mélangent afin de favoriser l’inclusion. Cela prouve que, malgré leur handicap visuel, les escrimeurs ne sont pas limités. Au contraire, tous leurs sens sont 1000 fois plus développés. Étant moi-même une personne aveugle je trouve que c’est une bonne chose d’avoir créé des clubs d’escrime pour non-voyants et malvoyants. Ceci me plaît, car tous les déficients visuels ont le droit de pratiquer le sport qui leur plaît le plus.

Cependant, j’étais déçue et triste de constater qu’en Suisse cette inclusion est quasi inexistante. Le sport est primordial pour la santé de tous.

Pour l’instant, à ma connaissance, proche de chez moi, ce n’est qu’en France qu’il existe des clubs inclusifs d’escrime.

Grâce à cet article, j’espère que la Suisse va ouvrir ses portes en intégrant des personnes avec un handicap visuel à pratiquer l’escrime.

L’escrime est un bon sport où la mixité y est présente demande beaucoup d’énergie. Il faut une grande concentration et de bons réflexes.

J’espère que les lecteurs et lectrices ne vont pas s’arrêter à la lecture de cet article, mais également se rendre à des tournois d’escrime en France.

Le saviez-vous ?

« Le pays avec la plus ancienne tradition d’escrime est la Chine. Dès le 27e siècle av. J.-C., les Chinois maîtrisaient déjà l’art des armes, en particulier celui du sabre. Plus tard, au 22e siècle av. J.-C., on fonde des écoles d’armes en Assyrie. »

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