La psychologie, profession basée sur l’observation et l’analyse, semble de prime abord indissociable de la vue. Comment, dès lors, un psychologue non-voyant peut-il exercer ?
Cet article met en lumière le parcours de Judith Halimi, psychologue non-voyante. Bien que je n’aie pas eu l’opportunité de l’interviewer directement, mes recherches m’ont permis de mieux comprendre son univers professionnel et les spécificités de son approche.
Cela a renforcé ma conviction : un psychologue aveugle ou malvoyant peut être tout aussi, voire plus, efficace qu’un professionnel voyant. Leur condition les pousse souvent à développer des stratégies et des compétences uniques. Ils cultivent une écoute active et attentive, étant particulièrement sensibles aux besoins émotionnels de leurs patients.
Une écoute bienveillante
Judith Halimi est une psychologue clinicienne non-voyante exerçant à Paris. Devenue aveugle vers l’âge de 20 ans, elle a ouvert son cabinet en 2010. Aujourd’hui, elle est reconnue comme l’une des psychologues les plus appréciées de la capitale.
Dans son cabinet, elle offre à ses patients un espace d’écoute et de bienveillance. Lors de la prise de rendez-vous, sa cécité n’est pas mentionnée. Les patients découvrent cette particularité en arrivant sur place. Loin d’être un obstacle, cela contribue à instaurer une relation de confiance, fondée sur l’authenticité et l’absence de jugement.
Judith Halimi possède une perception unique des interactions humaines. Elle capte des détails subtils tels que la respiration, les silences, les intonations et les variations dans la voix. Elle est également sensible aux mouvements corporels de ses patients, ce qui enrichit sa compréhension des émotions et des besoins. Dans l’émission « À vous de voir » sur France 5, un de ses patients témoigne : « Pour elle, le physique ne compte pas. On sait que l’on ne sera pas jugé sur ça, et c’est rassurant. »
En parallèle de son activité de psychologue, Judith Halimi s’investit dans plusieurs initiatives liées à la communauté non-voyante. Elle est membre du comité d’évaluation pour l’attribution de chiens guides à l’école « À vue de Truffe » de Caen. Celui-ci collabore avec l’Union nationale des aveugles et déficients visuels (UNADEV).
Elle anime également un groupe de parole au sein de l’association « Clin d’œil ». Ce groupe a pour mission de créer des liens, de rassembler, de soutenir et d’accompagner les personnes malvoyantes et non-voyantes dans leur vie quotidienne.
Par son travail et son engagement, Judith Halimi incarne une approche inclusive et humaine de la psychologie. Elle joue un rôle actif dans l’amélioration des conditions de vie des personnes en situation de handicap visuel.
Le « regard » unique des psychologues aveugles
Le « regard » des psychologues non-voyants est souvent perçu comme singulier. En effet, leur approche de la thérapie et de l’interaction humaine est profondément influencée par leur handicap visuel.
Bien qu’ils soient privés de la vue, leurs autres sens, notamment l’écoute, sont souvent développés de manière exceptionnelle. Ils prêtent une attention accrue aux détails subtils de la voix du patient, comme la tonalité, le rythme, les silences ou encore les hésitations. Cette finesse d’analyse leur permet de détecter des émotions ou des non-dits que d’autres pourraient ne pas percevoir. Par ailleurs, ils sont capables de capter des gestes ou des mouvements à travers les sons. Ils enrichissent ainsi leur compréhension des interactions.
Leur cécité peut également jouer un rôle positif dans la relation thérapeutique. Certains patients se sentent moins jugés, ce qui les encourage à s’exprimer plus librement. L’absence de regard physique peut apaiser la crainte d’être évalué sur son apparence, créant un espace de parole plus sûr et honnête. Pour d’autres, cette singularité favorise une communication plus directe, recentrée sur l’essentiel.
Ainsi, le handicap visuel des psychologues aveugles, loin d’être une limite, devient un atout précieux dans l’accompagnement de leurs patients, offrant une approche profondément humaine et intuitive.
Ce que j’en pense
Depuis mon enfance, le métier de psychologue m’a toujours fascinée. J’ai toujours été attirée par l’idée d’aider les individus, que ce soit en face à face ou au sein d’un groupe, dans un cadre bienveillant comme celui d’un cabinet. J’éprouve une profonde satisfaction à soutenir les personnes dans le besoin, quelle que soit la nature de leurs problèmes.
Je pense posséder une sensibilité particulière aux émotions et aux ressentis des autres. Cette capacité, que je percevais déjà lorsque j’avais la vue, s’est intensifiée depuis que je suis devenue aveugle.
Aujourd’hui, ma cécité est devenue une véritable force, un atout que j’intègre pleinement dans mes interactions humaines. Elle me permet d’associer plus aisément une voix à un ressenti, ce qui enrichit ma compréhension des émotions et des états d’esprit.
En tant que non-voyante, je m’intéresse tout particulièrement à la manière dont les émotions s’expriment à travers la voix, sans l’appui du visuel. Cette approche favorise une relation basée sur une confiance plus profonde, libérée de tout jugement lié à l’apparence.
En fin de compte, il ne s’agit pas de la vue, mais bien de la capacité à créer un lien de confiance et à comprendre les difficultés humaines. Faire confiance à un psychologue malvoyant ou aveugle, c’est d’abord croire en l’humain, au-delà des apparences.
Le saviez-vous ?
Le métier de psychologue
Le parcours pour devenir psychologue passe par des études universitaires rigoureuses, qui préparent à une profession exigeante et variée. Ces spécialistes de la santé mentale ont pour mission de conseiller, d’accompagner et d’apporter un soutien à ceux qui en ont besoin. Leur rôle inclut également la prévention des troubles psychologiques et l’aide à des professionnels confrontés à des situations difficiles.
Dans leur pratique quotidienne, les psychologues offrent une écoute attentive à des patients de tous âges confrontés à des souffrances morales variées. Leur champ d’intervention est vaste : ils collaborent avec des individus dans des contextes privés ou institutionnels et apportent leur expertise dans des domaines aussi divers que les établissements pénitentiaires, les structures hospitalières, ou encore les écoles.
L’origine de la psychologie
Les origines de la psychologie remontent à l’Antiquité, particulièrement en Grèce, où des philosophes tels que Socrate et Platon se sont penchés sur des questions fondamentales concernant l’esprit, le comportement humain et la nature de la conscience. Certains leaders spirituels et penseurs d’autres cultures ont également exploré des thématiques similaires, jetant ainsi les bases de la réflexion psychologique.
Cependant, la psychologie en tant que discipline scientifique ne voit véritablement le jour qu’à la fin du XIXe siècle. Wilhelm Wundt, souvent considéré comme le père de la psychologie moderne, a joué un rôle central dans cette évolution. En 1879, il fonde à Leipzig, en Allemagne, le premier laboratoire dédié à l’étude des phénomènes psychologiques. Ce laboratoire marque une rupture avec les approches philosophiques traditionnelles, en introduisant des méthodes expérimentales pour étudier scientifiquement l’esprit humain.
Wundt s’est concentré sur l’analyse des composantes de l’esprit, cherchant à comprendre les processus mentaux de manière systématique. Ses travaux ont eu une influence considérable sur le développement de la psychologie, orientant les recherches ultérieures et établissant les bases de nombreuses théories encore étudiées aujourd’hui.