« Le cheval, mon thérapeute »

Par Celya

Les bienfaits de la relation avec le cheval sont reconnus depuis l’Antiquité. En effet, le fait de monter à cheval était pratiqué en Grèce pour soigner certaines maladies somatiques et fortifier les muscles. Xenophon, historien grec du Ve siècle av. J.-C. disait : « le cheval est un bon maître, non seulement pour le corps, mais aussi pour l’esprit et le cœur ».

Les pays scandinaves ont été les précurseurs de la thérapie par le cheval au XXe siècle.

Au fur et à mesure, les bénéfices de l’activité d’équitation adaptée sont reconnus. De plus en plus de psychothérapeutes utilisent le cheval dans leurs thérapies de soin, que ce soit pour des maladies psychologiques, des personnes à mobilité réduites ou des maladies dégénératives comme la sclérose en plaques.

Celya Mbembe et Damien Richter, résidents à la Fondation Foyer-Handicap, pratiquent tous les deux l’équithérapie. Quels bénéfices en retirent-ils ? Quels liens ont-ils avec leur cheval ? Interview.

Celya sur Vaillant et Damien sur Lateo

Comment avez-vous connu la thérapie par le cheval ?
Ceyla : « Cela fait très longtemps, j’avais 13 ans ! J’avais dit à mon papa que je souhaitais monter à cheval. Il a passé du temps à chercher un manège adapté à mon handicap. J’ai commencé dans un manège faisant de l’hippothérapie dans le canton de Vaud. J’ai recommencé fin novembre 2022. Cela faisait au moins 15 ans que je n’étais plus remontée sur un cheval. J’attendais ce moment avec impatience. »

Damien : « J’en ai fait étant plus petit. Puis j’ai demandé à Foyer-Handicap de me trouver un centre adapté, parce que j’adore ça. Ils m’ont proposé une écurie à Sézenove. Maintenant, je monte à Meinier tous les quinze jours, les lundis après-midi avec ma monitrice Valérie. Ce centre est bien adapté pour moi. »

Étiez-vous nerveux la première fois que vous avez remonté à cheval à Meinier ?
Celya : « J’avais bien sûr quelques craintes. Je me demandais comment j’allais monter sur le cheval, si j’avais assez d’équilibre ou si les thérapeutes avaient l’habitude de mon handicap.

Cela dit, malgré mes peurs, le jour de ma première séance j’étais excitée comme une puce ! Arrivée dans les Hauts de Corsinge, j’ai senti l’odeur des chevaux et les ai entendus hennir. Toutes mes inquiétudes se sont envolées. J’ai toujours trouvé les chevaux beaux et majestueux. »

Damien : « Non, j’adore les chevaux depuis tout petit ! Ma maman en a peur, contrairement à ma sœur et moi ».

Comment montez-vous sur le cheval ?
Damien : « Nous mettons un harnais qui est attaché à un élévateur électrique qui nous hisse sur le cheval. »

Pourquoi faites-vous cette thérapie ?
Celya : « J’ai toujours aimé les animaux, surtout les chiens et les chevaux. Cette thérapie m’aide à m’évader et me fait oublier mon handicap. Pendant la séance, je me sens comme les autres. Le cheval me comprend et ne me juge pas, c’est agréable. Si je pouvais rester avec les chevaux pour toujours, je le ferais. »

Damien : « Pour me détendre. Avant que je découvre la thérapie par le cheval, j’étais très crispé dans les jambes. Dès que j’ai commencé cette thérapie, j’ai tout de suite ressenti beaucoup de bien grâce aux mouvements du cheval. Ça m’aide même beaucoup, par exemple j’ai plus de facilité à ramasser des objets par terre. »

Quel lien avez-vous avec le cheval ?
Celya : « Avec Vaillant, nous avons dépassé le stade de la relation “cavalière qui monte un cheval”. Nous avons créé un lien de confiance, de respect, d’amitié et de complicité. Ce sentiment est merveilleux. »

Damien : « Avec mon cheval qui s’appelle “Lateo”, on est uni. Quand je suis sur lui, je le fais s’arrêter rien qu’avec ma respiration. »

Quelle relation avez-vous avec votre thérapeute ?
Celya : « Avec Perrine, nous nous entendons très bien. Je suis en confiance avec elle. Je me sens écoutée et pas forcée à faire quoi que ce soit. Elle me demande toujours ce que je souhaite faire. Nous avons commencé à créer des liens très forts. »

Damien : « Valérie est super sympa et gentille. Quand je ne peux pas me rendre aux écuries, je l’appelle et l’on s’arrange. J’ai confiance en elle. »

Quels sont les bienfaits de cette activité ?
Celya : « Elle me procure beaucoup de plaisir. C’est très physique. Ce n’est pas moi qui marche, c’est le cheval qui le fait pour moi. Cela fait du bien à mon corps, mes muscles et mon moral. Le cheval, ce sont mes yeux et mes jambes ! C’est un sport et une thérapie tout-en-un. Si je pouvais monter à cheval plus souvent, je le ferais. Je me sens bien, apaisée. Je pourrais rester des heures à cheval, je suis vraiment dans mon élément ! »

Damien : « A chaque fin de séance, je me sens détendu. »

Comptez-vous continuer longtemps ?
Celya : « Oh oui ! J’aimerais même rajouter des séances ! Ça serait le paradis. »

Damien : « Oui, tant que je peux ! »

 « Nous conseillons à toutes les personnes en situation de handicap qui aiment les chevaux d’essayer ! »


Rencontre avec Valérie Renggli, directrice, et Perrine Beccaria, thérapeute avec le cheval, de la Fondation Equi-page.

Valérie Renggli et Perrine Beccaria  Photo © Fondation Equi-page


Valérie Renggli a découvert la thérapie avec le cheval grâce à l’association Anima à Genève qui propose de la thérapie avec des chevaux, accompagnée par des psychomotriciennes. « J’ai ensuite rencontré Séverine Perrenoud Kakulya qui travaillait comme thérapeute avec le cheval, mais aussi comme monitrice d’équitation pour Handisport Genève. Ayant déjà de l’expérience dans l’enseignement de l’équitation, j’ai suivi la formation avec PluSport en 2012 et 2013 pour obtenir le diplôme de monitrice sport handicap. J’ai également fait des stages en 2012 au sein de la Fondation Foyer-Handicap et en 2013 au sein de l’entreprise sociale Trajets. Suite à cela, j’ai commencé à donner des cours d’équitation aux personnes en situation de handicap avec le groupe Handisport Genève. »

Perrine Beccaria est thérapeute avec le cheval et a rejoint la Fondation Equi-page en octobre 2021. Elle travaille avec les chevaux Lateo, Nino et Vaillant.

Parlez-nous d’Equi-page
Valérie : « La Fondation Equi-page est une structure qui accueille des personnes en situation de handicap pour de la thérapie avec le cheval ou pour de l’équitation adaptée. Dans le premier cas, les personnes ont une demande thérapeutique, avec l’objectif d’aller mieux. Dans le second cas, les personnes souhaitent apprendre à monter à cheval et ont un objectif sportif. La Fondation a une cavalerie de 3 chevaux spécifiquement formés. 

J’ai souhaité créer une structure pour pouvoir bénéficier de subventions et pouvoir ainsi proposer nos prestations à des tarifs accessibles à tous. Étant monitrice d’équitation, j’ai pensé qu’il serait judicieux d’inclure la thérapie avec le cheval, alors j’ai proposé à Lorianne Scheller, thérapeute avec le cheval, si elle souhaitait participer à cette aventure. C’est ainsi que nous avons cofondé la Fondation Equi-page en 2017 pour pérenniser nos activités. »

Pourquoi avez-vous souhaité faire ce métier ?
Valérie : « Pour allier ma passion du cheval, mon expérience de monitrice d’équitation et mon envie de partager les petits et grands bonheurs de l’équitation avec ceux qui ne peuvent pas se rendre dans un centre équestre ordinaire. J’aime être le petit maillon nécessaire à une bonne relation entre le cavalier et le cheval, à un bon apprentissage des techniques équestres dans la confiance et la sécurité. »

Comment adaptez-vous les séances en fonction du handicap ou trouble de la personne ?
Valérie : « Je m’adapte à la mobilité, à la fatigabilité, à l’expérience, à la forme du jour de chaque participant. Pour cela, je peux adapter le harnachement du cheval, le matériel utilisé pendant le cours, choisir si l’on va se promener ou travailler des exercices en carrière. On peut ensuite choisir le cheval adéquat, adopter les allures du cheval qui conviennent – pas, trot ou galop. Bref, il y a une multitude de choses que l’on peut adapter. »

L’équithérapie
Perrine : « C’est apporter un mieux-être, se faire du bien, psychiquement et physiquement, grâce au cheval. On utilise le cheval pour travailler sur nos émotions, sur nos relations avec les autres et sur notre corps. On peut pratiquer cette thérapie en montant à cheval, mais aussi en étant à ses côtés. Quand on est à cheval, les mouvements sont bons pour les muscles, le squelette et les émotions. Une chose fondamentale dans cette thérapie, c’est l’effet miroir. Le cheval reflète l’état émotionnel de la personne. »

Comment avez-vous choisi vos chevaux ?
Valérie : « Nous avons choisi des chevaux sans traumatismes antérieurs, sans histoire lourde, en bonne santé, d’un âge mûr, mais encore jeunes pour être en pleine santé. Des chevaux sensibles avec des caractères calmes et patients, de taille moyenne pour être porteurs sans être trop grands. Et nous les avons ensuite formés pour qu’ils sachent ce qu’on attend d’eux. »

Perrine : « Nos trois chevaux sont des chevaux de thérapie, mais je pense qu’on pourrait travailler avec n’importe quel cheval. On les choisit par rapport à leur tranquillité, leur stabilité et leur capacité à être courageux. Par exemple, Vaillant ne va pas avoir peur des changements et on peut lui faire confiance. C’est un être vivant, il peut être surpris à quelque moment. On va avoir tendance à plus choisir des chevaux qui ont l’habitude d’être à l’extérieur, de travailler dans les champs. On attend de nos chevaux qu’ils soient calmes et patients. Si le cheval est très nerveux et ne peut pas tenir en place cela serait compliqué. La sécurité est notre priorité. »

Pour en savoir plus : 
https://fondation-equi-page.ch/nos-activite/nos-therapeutes-monitrices/

EQUI-PAGE —Reprendre les rênes de sa vie
https://www.rts.ch/play/tv/ensemble/video/equi-page-reprendre-les-renes-de-sa-vie?urn=urn:rts:video:13121579